Le Gmi a sévèrement refoulé les populations qui réclamaient le retour de l’électricité.
Sainclair Mezing et Sebastian Chi Elvido
"Libérez l’énergie! Libérez l’énergie!" scandaient hier, lundi 17 septembre, aux environs de 12 h, les élèves de la ville d’Abong-Mbang venus se joindre aux autres populations qui, depuis vendredi 14 septembre, manifestent dans la ville et s’insurgent contre les délestages dont ils sont victimes depuis quelques mois. La mine sombre et l’air menaçant, ils se sont rendus à la préfecture d’Abong-Mbang pour y crier leur courroux. C’est à leur arrivée dans ces locaux que tout a dégénéré. Ils ont été stoppés net dans leur élan par des éléments du Groupement mobile d’intervention (Gmi) venus spécialement de Bertoua depuis vendredi dernier, à la demande du préfet.
Ces derniers ont, selon des témoignages, ouvert le feu sur les populations qui faisaient mine de ne pas entendre les ordres qui leur étaient donnés. Joint au téléphone, Gustave Moamoasse, maire d’Abong-Mbang, a confié : "Il y a eu une réunion de concertation dimanche 16 septembre au soir. Au cours de cette rencontre, les responsables de Aes Sonel ont fait la promesse ferme d’envoyer l’énergie électrique hier, lundi à midi. Or, à cette heure là, il n’y avait toujours pas de lumière. C’est à ce moment que les populations se sont soulevées. Les éléments du Gmi, venus de Bertoua il y a 2 ou 3 jours, au lieu de dissuader les populations, ont tiré à balles réelles. Il y a eu 2 morts, et 4 blessés graves que je suis en train de faire évacuer d’urgence à Yaoundé." Hier en fin de soirée, des sources bien introduites ont annoncé six morts dans ces affrontements.
Incidents
Le reporter de la Crtv, Jean Dunor Kemche, faisant le compte rendu de cette manifestation hier au journal parlé de 17 h, a indiqué que ce sont les populations qui ont tiré sur les hommes en tenue avec des armes artisanales, une thèse que réfutent énergiquement des élites de la localité avec qui nous avons discuté au téléphone. Pour elles, ce sont bel et bien les éléments du Gmi venus de Bertoua qui ont brutalisé les manifestants, et tiré sur eux, avec le bilan connu.
Cette sortie des éléments du Gmi de Bertoua vient alors mettre de l’huile sur le feu. Les populations, courroucées, ont aussitôt assiégé la préfecture et y ont mis du feu. Le préfet, Sylvestre Essama, a tout juste eu le temps de s’enfuir. Après la préfecture, la foule s’est déportée vers l’agence Aes-Sonel d’Abong-Mbang qui a été également incendiée. Quelques temps plus tard, c’est la résidence du préfet du Haut-Nyong qui a été brûlée par les populations, qui rendent ce dernier responsable du décès des personnes atteintes par balles par les éléments du Gmi. "J’ai vu le préfet de mes propres yeux tirer sur les élèves. Un est mort sur le coup", affirme un témoin joint au téléphone.
Dans la foulée, plusieurs autres blessés plus ou moins graves ont été enregistrés dans les hôpitaux environnants. "C’était effrayant, tout ce monde qui courrait dans tous les sens et les coups de feu qui crépitaient sans cesse", a confié un maître d’école, joint au téléphone. Le mouvement s’est répercuté quelques heures plus tard à Doumé, localité située à quelques kilomètres d’Abong-Mbang. D’après le maire de cette localité, Awala Balada, les populations ont creusé des tranchées sur la route, empêchant ainsi les véhicules de circuler.
Rebelote
Depuis vendredi, 14 septembre dernier en effet, la ville d’Abong-Mbang est sous haute tension. Jusque tard dans la nuit ce jour-là, l’entrée de la ville a été bloquée. Les populations, à l’aide des branchages, des pierres, des pneus et des carcasses de véhicules, ont érigé des barricades sur la route qui relie les villes de Yaoundé et de Bertoua d’une part, et les autres pays de la Cemac à savoir, le Tchad, la République Centrafricaine et le Congo, d’autre part. Les usagers en partance ou en provenance dans un sens comme dans l’autre se sont trouvés dans l’obligation de camper sur place pour les uns, et de rebrousser tout simplement chemin pour les autres.
A la suite de ces incidents, le ministre de l’Energie et de l’Eau, Jean Bernard Sindeu, a précisé dans un communiqué publié hier qu’une mission technique de Aes-Sonel devrait se rendre à Abong-Mbang dès ce jour avec le matériel approprié afin de rétablir l’électricité dans les zones sinistrées. Pour sa part, la direction de Aes-Sonel a rendu public un communiqué hier soir.
Dans cette note, la direction de cette entreprise rassure les populations en annonçant l’installation en urgence d’une vingtaine de machines neuves d’une puissance totale de 03 MW qui sera lancée "mardi prochain ", ce qui devrait permettre le retour à la normale d’ici la fin de la semaine en cours. Elle annonce également l’installation prochaine de 02 groupes neufs de 02 MW chacun, qui seront acheminés du port de Douala vers Bertoua la semaine prochaine. Ces machines qui seront mises en service avant fin octobre, permettront de stabiliser définitivement l’alimentation de la province de l’Est et de mettre fin aux perturbations actuelles.
Cette manifestation de colère, bien qu’elle soit la plus spectaculaire, n’est pas la première que l’on vit dans cette partie du pays. Depuis le mois d’août dernier, les populations de la province de l’Est se plaignaient déjà de ces délestages qui ralentissent les activités dans cette province. A cette époque déjà, le chef d'unité commerciale Aes-Sonel pour l'Est, Rim à Mbelen, annonçait que ce délestage est dû à une panne survenue sur l'un des groupes qui alimentent les principales villes de l'Est à partir de Bertoua. Cette panne, disait-il, a réduit la capacité de distribution de l'électricité de 3100 à 1800 kw.
mboasawa
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