Les juges se prononceront sur la validité de la procédure relative à l'enquête sur le meurtre de ce militant du Sdf.
Jean Baptiste Ketchateng

Hier en effet, les avocats du Sdf ont rappelé qu'ils demandaient - depuis l'audience du 13 octobre - l'annulation de toute la procédure conduite jusqu'alors. Le banc de l'accusation a d'abord essayé de démonter cette prétention. D'après le procureur de la République "aucun élément de preuve " n'a été produit par la défense, pour montrer que les accusés avaient effectivement été menacés ou torturés, comme ils l'ont prétendu. Au sujet de la nullité de l'ordonnance de renvoi, qui serait viciée par l'absence de confrontation entre les accusés et les témoins à charge, le procureur de la République a jugé que l'absence de cette opposition de versions des faits n'était pas de nature à entraîner une annulation.
Interpellé également au sujet de l'inculpation d'un sourd-muet, Justice Mbah, alors que ni le juge d'instruction, ni les gendarmes n'ont entendu l'accusé, le procureur a évoqué une jurisprudence française pour maintenir M. Mbah dans le box des accusés. La défense demandait en effet que le tribunal le libère, " lui au moins ". " Comment peut-on juger quelqu'un qui n'a pas été entendu ? ", s'est encore demandé son avocat. Pour le procureur cependant, il n'est point établi, tout d'abord, que Justice Mbah soit sourd et muet. Et puis, notera-t-il en se référant au juge français : ce n'est pas tant l'interrogatoire qui importe, mais la mise à connaissance des faits pour lesquels l'on est poursuivi.
Enfants
Pour la défense cependant, il restait que le mandat sur la base duquel les accusés ont été détenus avant d'être déférés à la prison centrale de Kondengui est un arrêté préfectoral. Le préfet du Mfoundi Joseph Beti Assomo avait en effet signé le 26 mai, un arrêté de garde à vue administrative d'une durée de 15 jours. Seulement, la demande du commandant de groupement de gendarmerie de Yaoundé qui saisit le préfet à cette fin est daté du…30 mai. Et au bout des investigations, c'est après 45 jours que les accusés ont été transférés à la prison. " Pourquoi le procureur a-t-il omis de répondre à cette question ? " s'est demandé un avocat de la défense. Suscitant la réplique du procureur pour qui, il n'y avait pas lieu pour un juge d'instruction de s'interroger sur l'opportunité d'une garde à vue administrative qui a pourtant permis de confier à son enquête les 24 personnes (deux sont décédées) qui ont été inscrites dans l'ordonnance de renvoi.
Le débat juridique ainsi lancé n'a pas empêché les débats de sortir du cadre du droit et des faits. "Diboulé était notre camarade. Il y en a qui veulent en parler plus que nous. Nous nous sommes occupés des enfants de Diboulé ", a par exemple lâché Me Augustin Mbami, avocat de la défense et trésorier du Sdf. Suscitant la colère des proches et de la famille de Grégoire Diboulé dont l'avocat avait relevé qu'au lieu de s'apitoyer sur le sort de l'accusé sourd-muet, il faut se souvenir que le défunt a laissé une veuve et des enfants. " C'est très méchant de mentir ainsi ", a déclaré l'un d'eux, dans la cohue de la sortie. L'une des filles du défunt qui se trouvait là, n'avait point en effet souvenir d'une quelconque assistance du Sdf apportée à sa famille.