Patrimoine.
Look soigné et très original, une toque et une tenue traditionnelle assortis, une bandoulière qui porte son Ye-Ndem, la sanza traditionnelle dont il ne se sépare que pour dormir. Jasmin Sangouang aspire à remplacer Pierre Didi Tchakounté.
Le père putatif du «Mangambeu sophistiqué», une musique traditionnelle de l’Ouest cameroun, rendue populaire dans les années 80, et qui a inspiré le promoteur du Ye-Ndem. «C’est en regardant Pierre Didi Tchakounté jouer de la sanza que l’envie de jouer de la sanza m’est aussi venue», avoue Jasmin Sangouang. Une envie qui ne l’a plus quitté, au point de devenir une obsession. Samedi dernier, le promoteur de Ye-Ndem a inauguré une exposition d’instruments musicaux traditionnels, de la famille de la sanza, au centre culturel Savannah à Yaoundé. Une manière, selon lui, de « faire découvrir au grand public l’existence de cet instrument de musique traditionnel, et de préserver le patrimoine musical camerounais ».
Le Ye-Ndem, littéralement musique des dieux en dialecte Yemba parlé à Dschang, a jadis été très utilisé dans la Menoua. Formé d’un caisson en bois d’une essence rare, le «Kekeu», dont on se sert aussi pour fabriquer le balafon, d’une harpe et de quatre paliers de mini-xylophones en bambou, le Ye-Ndem se joue en pinçant les cordes et en faisant vibrer les lamelles des xylophones. Jasmin Sangouang est issu d’une lignée de musiciens. Son grand-père allait, une fois par semaine, jouer de la sanza sur la place du marché de Dschang. Son père a aussi été un griot de la même trempe. En 1980, son oncle lui offre une sanza, toutes choses qui vont contribuer à attiser l’amour de la musique chez le jeune Sangouang. Et pourtant, lui se passionne de la guitare. En 1994, il opère un virage à cent degrés, abandonne la guitare pour se concentrer sur le Ye-Ndem, un instrument traditionnel qu’il ne quittera plus. Et de penser partager son art avec plus jeunes que lui. « J’ai formé plus de deux cent jeunes à jouer du Ye-Ndem, et je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin. Si je pouvais être soutenu, j’ouvrirai une école », implore Jasmin Sangouang.
Dans l’attente, le créateur du Ye-Ndem peut être fier de ces récompenses que sa création a obtenues. Lors des Journées technologiques nationales organisées par le ministère des Mines, de l’Industrie et du développement technologique en 2005, le Ye-Ndem a reçu le quatrième prix. Bien plus. L’instrument de musique a été breveté à l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle le 30 septembre 2010. Preuve, se besoin est, de l’intérêt que le Ye-Ndem constitue pour la préservation du patrimoine culturel africain. En attendant, le public est invité à visiter l’exposition de sanzas traditionnelles dont le vernissage a lieu samedi dernier au Centre culturel Savannah à Yaoundé. Elle court jusqu’au 27 octobre prochain.
Jacques Bessala Manga