Le titre de cet ouvrage, paru en 2011 chez l’Harmattan, 285 pages, est à lui tout seul révélateur de la démarche de son auteur: Convoquer des faits apparemment anodins et ordinaires de la vie quotidienne au Cameroun, les théoriser et les rendre intelligibles. Mais davantage montrer comment, par leur permanente et constante actualisation dans la scène publique camerounaise, ils définissent mieux que d’autres, ce qu’est un Camerounais.Ces faits s’objectivent dans la façon de se vêtir, dans le phénomène de la mendicité, dans les rythmes musicaux et notamment dans le Bikut-si, et de façon générale, dans les comportements des Camerounais face à certaines situations de la vie ordinaire. Autant de pistes, de domaines d’observation somme toute ordinaires. Mais qui livrent, dans l’ouvrage de Jean-Claude Mbarga, tous leurs enseignements.Mais pour leur arracher ces secrets, il a fallu régler au moins deux préalables: Etre en mesure de d’observer la société camerounaise c'est-à-dire avoir été «capacité» à le faire. De ce point de vue, c’est un truisme de dire que l’auteur de «Manuel d’ingrédients culturels camerounais», est un initié dans «l’intelligibilisation» des signes. Professeur des universités, enseignant à l’université de Yaoundé I (Il enseigne dans cette dernière institution universitaire notamment la sémiotique de la publicité) Vice président de l’Association internationale de sémiotique… Jean-Claude Mbarga, multiplie les aptitudes et les casquettes.Il a ensuite fallu se soumettre à une observation et une analyse cliniques de la scène publique camerounaise. Le résultat de cet exercice d’ascète se décline en un panorama de «vérités camerounaises qui, à y regarder de près, sont des vérités universelles» pour reprendre l’auteur lui-même.Mais «Manuel d’ingrédients culturels camerounais» n’est pas seulement une analyse critique des traits caractéristiques du Camerounais. C’est aussi une invite. Une invite à l’introspection. Une invite à la prise de conscience. De nos qualités, mais aussi de nos limites. Celles qui appellent de notre part, et d’urgence, un changement de paradigme, un retour aux véritables valeurs, un «changement radical de nos mentalités». «Vérités camerounaises, mais vérités universelles» dit donc l’auteur. Car si le gros oeuvre est consacré au Cameroun, Jean-Claude Mbarga n’a fait l’économie d’une analyse de la scène internationale. A ce titre, il pose un premier constat. Le capitalisme a fait étalage de ses côtés pervers. Après quoi, Jean-Claude Mbarga engage son plaidoyer. Plaidoyer pour «l’humano-capitalisme» (L’expression est de lui), c'est-à-dire un capitalisme à visage humain. Plaidoyer pour un monde meilleur. C’est dans ce monde meilleur qu’après avoir opéré sa mue et après s’être débarrassé de ces vêtements qui le rapetissent, le Camerounais pourra s’intégrer.«Manuel d’ingrédients culturels camerounais» apparaît in fine, vu du lecteur, comme une contribution, celle d’un homme averti, au développement culturel de l’Homme. Vu de son auteur, il apparaît davantage comme un devoir. Celui de partager ce qu’il a, ce qu’il sait. Car comme disait Norbert Zongo, repris par Jean-Claude Mbarga, «Le pire ce n’est pas la méchanceté des hommes mauvais, mais le silence des hommes bons».
Serge D. Bontsebe
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