La jeune génération avide d'en savoir davantage sur l'histoire du Cameroun ne sera pas déçue. "Cameroun, combats pour l'indépendance", relate avec force détails les fondements et les principales phases de la lutte menée héroïquement par des combattants de l'Union des populations du Cameroun (Upc), "torturés ou exilés", pour le triomphe de la liberté et l'indépendance. Le livre revient ainsi en cinq parties distinctes, entre autres, sur la naissance et l'évolution du nationalisme camerounais, l'audition des pétitionnaires de l'Union des populations du Cameroun (Upc) aux Nations-unies, l'offensive colonialiste, les festivités marquant l'accession à l'indépendance. Marie-Irène Ngapeth Biyong relate également les circonstances de son entrée dans le maquis, présente les grandes figures du combat pour l'indépendance et tire les leçons de "l'épopée fantastique".
L'auteur indique que dès la consécration de la division du Cameroun au profit des puissances coloniales, les populations locales manifestent leur refus contre cette occupation et dénoncent la division artificielle et arbitraire du pays. En pôle position des revendications, l'Upc voit le jour le 10 avril 1948 à Douala. Une idée d'un groupe de nationalistes conduits par Ruben Um Nyobé. Dès sa naissance, soutient l'auteur, l'Upc s'engage dans l'éducation des masses sur le rôle de l'Organisation des Nations unies pour la libération des peuples coloniaux et le devoir des nations tutrices, de préparer les pays concernés à l'indépendance. Le 29 novembre 1954, le secrétaire général de l'Upc, Ruben Um Nyobé, fait une importante mise au point devant la Commission de tutelle de l'Assemblée générale des Nations-unies sur le bien fondé des revendications nationalistes ayant trait à l'indépendance du Cameroun.
Objectivité
"Quelles sont maintenant les objections communes qu'on oppose à nos revendications nationalistes ? D'abord, les difficultés d'ordre linguistique, en deuxième lieu, l'existence des tribus, en troisième lieu, le manque de maturité des populations [et] en quatrième lieu, le manque d'unité ethnique qui rentre dans le cadre du problème ethnique ". Dans son argumentaire, le Sg de l'Upc démonte ces "objections" soulevées par des affidés camerounais de l'administration coloniale. Qui présente par ailleurs l'Upc comme une filiale du parti communiste français.
Le 22 avril 1955 à Douala, face au refus de l'administration française fixer un délai à la durée de la tutelle en vue de l'accession du Cameroun à l'indépendance, le bureau du comité directeur de l'Upc, le bureau central de l'Union des syndicats confédérés, le comité exécutif de la jeunesse démocratique du Cameroun, le bureau de l'Union démocratique des femmes camerounaises (dont Marie Ngapeth est la secrétaire générale) proclament la fin du régime de tutelle et annoncent l'édification d'un Etat camerounais souverain.
C'est l'élément déclencheur de la "répression sauvage" de mai 1955. "Sous le prétexte aussi grotesque que désuet d'enrayer le courant communiste, l'autorité administrante prend la décision de faire couler le sang des Camerounais en faisant usage d'armes modernes contre de paisibles populations sans défense". Quelques années après, les colons français ordonnent la dissolution de toutes les organisations nationalistes.
C'est dans "l'élan de pacification des régions troublées " que Ruben Um Nyobé est "lâchement assassiné par les troupes françaises avec la bénédiction des membres du gouvernement présidé par l'un des anciens conseillers de l'Union française M.Ahmadou Ahidjo".
D'une richesse factuelle indéniable, le livre de Marie Irène Ngapeth est écrit dans un style digeste. On peut simplement regretter que l'expérience personnelle de l'auteur dans le maquis n'ait pas fait l'objet d'un chapitre à part entière, pour plus d'objectivité historique.
Georges Alain Boyomo