Il est un habitué des bains de foule. Celui de jeudi dernier était un énième pour Valséro. Un énième cri d’une jeunesse camerounaise désabusé par le «système». Un ras-le-bol de plus pour ponctuer cette 44ème édition de la fête de la jeunesse. L’esplanade du club Camtel de Bépanda (Douala) a abrité la masse de jeunes qui, comme le «Général» Valséro, demande des comptes au chef de l’Etat. La soirée était spécialement consacrée au rythme hip hop. En attendant l’auteur de «Réponds», le podium a ainsi connu le passage de nombreux autres rappeurs. Difficile pour ces derniers de calmer l’impatience d’un public, qui guette l’arrivée de son «général».
Valséro arrivera en grande pompe, sur fond de musique tonitruante. La foule est comme en transe. Le décor est planté pour des lyrics hardcore, durs et hostiles au régime. Les «gens d’en bas» s’en donnent à cœur joie. Accompagné de son acolyte, Jumper, Valséro interprète six titres tirés de ses deux derniers albums. Simultanément, ils sont repris en chœur par ses fans. Le la est donné par un hymne contre la corruption, la dictature et la gabegie, qui sévissent dans le pays des Lions Indomptables. Un «Pays maudit» que les textes réprobateurs du rappeur tentent d’exorciser. Ses adeptes se comptent visiblement par milliers. Difficile pour Tony Nobody, le présentateur de la soirée, de contenir certains qui essayent de rejoindre leur idole sur scène.
Ambiance
Les gros bras ne parviendront pas à maîtriser ceux pour qui «ce pays tue les jeunes». En effet, ils sont nombreux, ceux qui sont prêts à franchir la barricade en bois pour jouer les choristes, ou, simplement, toucher l’artiste. Au vu de la situation qui semble dégénérer, Tony Nobody tente une exhortation. «Nous n’avons pas besoin de vivre un concert tel celui de Diam’s à Yaoundé. Calmez-vous les gars», se risque-t-il.
Embrasés par la «Lettre au Prési», les jeunes font la sourde oreille. Le refrain du titre est assez évocateur, aussi scandent-ils : «Prési arrête ça, c’est ça ton travail. Inch Allah je jure un autre fera le travail. Le peuple n’en peut plus, les jeunes en ont marre. On veut aussi goûter le goût du miel, sinon on te gare…». L’ambiance est de plus en plus survoltée lorsque Valséro entame l’interprétation de son dernier succès: «Réponds». Une interpellation de plus du président de la République.
Valséro s’interrompt un moment pour accueillir Nkotti François, qui l’a rejoint sur le podium.
Le promoteur de la Foire musicale artistique industrielle et commerciale (Fomaric), par ailleurs maire Rdpc ( !) de Bonaléa, reçoit les encouragements du jeune artiste. «Je remercie ce grand homme d’avoir pris le risque de m’inviter. Surtout que ces derniers temps, je suis de plus en plus censuré», lance Valséro avec ironie. Propos ponctués par une salve d’applaudissements du public juvénile. L’artiste en profite pour promettre un nouvel album pour «bientôt». Il sera baptisé «Autopsie», dit-il. En avant goût, Valséro chante : «On est jeune, on est fort, on n’est pas mort». Des mots d’encouragement, selon toute vraisemblance, pour ceux qui n’ont pas encore vu «le bout du tunnel». Prometteur…
Monique Ngo Mayag
mboasawa
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