"Exil", le premier album du jeune groupe camerounais, est riche d'influences et d'expériences.
Jules Romuald Nkonlak
L'une des questions qui peut effleurer l'esprit lorsqu'on écoute le tout nouvel album de X-maleya, c'est celle de savoir s'il s'adresse à un public d'ici ou d'ailleurs. On peut se demander s'il veut aller en exil (c'est le titre de l'album), ou plutôt s'accrocher aux valeurs du terroir à qui les trois jeunes artistes rendent hommage. Mais, cette question, on ne se la posera pas bien longtemps. On aurait effectivement des éléments d'argumentation dans l'un et dans l'autre sens. Ces airs de RnB et de hip hop qui font penser à la jeunesse occidentale, mais aussi cette langue bassa bien d'ici, qui offre une belle valorisation de la culture camerounaise.
En fait, la musique du groupe X-maleya n'a sûrement pas envie de se cantonner dans un espace, elle se veut universelle, d'un "universalisme digne et valorisant", comme on peut le lire sur la pochette de cet album de 10 titres, entièrement réalisé au Cameroun, par les soins d'un autre jeune Camerounais, que l'on connaissait sous une autre facette : Ruben Binam du groupe Macase. C'est également ce dernier qui a produit l'oeuvre, sous le label Alizés, et qui a donné une nouvelle orientation a une musique qui avait une coloration entièrement rap.
Au fil de cet album, on passe de la fête à la méditation. On peut en effet se lâcher complètement, entraîné par le rythme enlevé de "Ole Ole", ou encore de "Bouge". Mais, on ne manquera pas, plus loin, d'avoir une pensée pour l'Afrique, de penser aux problèmes qu'elle connaît avec "Amudja", de se recueillir en pensant au tout Haut (Hola mè), ou en fredonnant, avec la voix de Ginette Wondja et le saxophone d'Alain Oyono, une "mélodie d'espoir et d'amour pour ces enfants qui se meurent".
La chanson s'appelle "Mélodie d'espoir", et comme le reste de l'album, elle rassemble en son sein des influences et des expériences multiples. Avec Roger Samnick, Auguste Rim (voix) et Haïssam Etoundi Zaïter (guitare), les trois membres de X-Maleya, on retrouve Roger Minka, Serge Maboma (Macase), sans oublier Ruben Binam, Alain Oyono et Ginette Wondja.
Des contributions qui font de ce titre un concentré d'expériences plurielles, au coeur d'un album lui-même pluriel, à l'orchestration et à la qualité acoustique plutôt rare pour un produit entièrement "made in Cameroon". Et l''un des messages que cet album véhicule est aussi celui de la posibilité de faire de belles choses au Cameroun. Comme "Matumba", la chanson d'Eboa Lotin. La chanson est reprise dans cet album, pour rendre hommage à son auteur, mais aussi pour lui donner une nouvelle vie.
Cette reprise est une autre illustration de la fusion que l'on retrouve dans l'oeuvre. On perçoit des sons semblables à ceux des balafons et la chanson commence par ces fameux "mendzang" popularisés il y a quelques années par le Richard Band de Zoétélé. Mais très vite, elle prend des contours plus urbains, avec notamment l'intervention du rappeur Elkim. Et comment ne pas s'arrêter sur la voix impressionnante de Roger Samnick ?
"X-Maleya est l'élan de la jeunesse africaine des années 90", indique la pochette du disque. A écouter "Exil", c'est un élan qui est bien pris, mais qui devrait certainement avoir besoin d'un certain encadrement pour aller le plus loin possible. La touche de Ruben Binam, Serge Maboma, Wilfried Etoundi et tous ces aînés, pionniers d'une musique camerounaise qui s'ouvre au monde, y participe déjà.
mboasawa
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