Plus de caméras, plus de climatisation, plus d'émetteurs, etc.
Christophe Bobiokono
Les téléspectateurs de la Cameroon Radio Television de Douala ont été sevrés d'images à plusieurs reprises au cours de la semaine écoulée. Comme toujours, ces suspensions intempestives d'émission étaient attribuées à des " problèmes techniques " consécutifs, selon les recoupements faits par Mutations, aux pluies interminables qui tombent à Douala ces dernières semaines. En fait, ce constat traduit la frilosité du système de transmission de la Crtv. Et, par extension, de l'ensemble de l'outil de production de l'entreprise.
Dans la lettre ouverte adressé au directeur général le 24 août 2006, une partie du personnel faisait d'ailleurs remarquer que " l'outil technique [de la Crtv] ne permet pas aux employés de donner le meilleur d'eux-mêmes pour relever les défis qui interpellent l'entreprise face à une concurrence de plus en plus rude ". Ils ajoutaient que " [leur] environnement global de travail est déplorable et commence à constituer une réelle menace pour la santé des employés du fait du surchauffement des équipements, de leur trop grande vétusté et de la présence avérée de l'amiante. Faites un tour dans les bancs de montage, la matrix, les studios de production, de continuité du journal, les centres de diffusion pour vivre, en l'espace de quelques minutes, le calvaire quotidien et le niveau d'exposition aux radiations de ceux qui y travaillent ".
Le 25 août dernier, deux reporters de Mutations se sont offerts une balade en certains de ces lieux à Mballa II. A la Matrix, centre nerveux de la télévision d'où sont reçus et envoyés toutes sortes d'images, la température était quasiment insupportable. On dirait un four… Le ventilateur placé à l'entrée du bocal (acquisition personnelle de ceux qui y travaillent à ce qu'il semble) tentait vainement de rafraîchir l'intérieur. D'après les informations glanées dans la maison, ces fortes températures notées aussi bien à la matrix qu'au niveau des bancs de montages, et des studios, étaient consécutives au mauvais fonctionnement du système de climatisation du centre de production de Mballa II. Selon un technicien, " sur les 22 compresseurs du système, deux seulement [étaient] encore opérationnels ".
Locations
Ce même 25 août 2005, Mutations a pu observer le désastre que connaît l'outil de production de l'entreprise. Dans le journal télévisé présenté ce soir-là, huit sujets sur dix avaient été tournés avec des caméras amateurs (comme indiqué sur le synthé). C'est-à-dire des caméras louées auprès des privées. " Nous n'avons plus suffisamment de bancs de montage, expliquait un journaliste, avant d'ajouter : certains jours, c'est la bousculade. Il faut parfois l'intervention de certains chefs pour réussir à monter un élément. Pour certaines émissions telles 'Bonjour' et 'Hello' on est obligé de recourir à des équipements d'un privé ".
En principe, dit un technicien pour expliquer les coupures récurrentes d'émission sur le réseau de la Crtv, " on installe des émetteurs par paire, pour faire en sorte que l'un fonctionne pendant que l'autre est en attente, près à prendre le relais à tout moment. Ce n'est plus le cas à la Crtv. Il n'y a plus qu'un émetteur pour chacune de nos chaînes. Plutôt que d'acheter les pièces pour les remplacer en cas de panne, on a passé le temps à en récupérer dans l'un des émetteurs. Ce qui le rendait du coup inutilisable ".
Le diagnostic fait par Amadou Vamoulké à son arrivée donne une meilleure idée de l'ampleur des dégâts. Estimé à quelque 50 milliards de Fcfa à l'origine (hormis les relais de transmission et le bâtiment), la valeur de l'outil de production de Mballa II serait tout simplement nulle aujourd'hui. " Dans la pratique, explique un cadre de l'entreprise, il aurait fallu que l'entreprise économise chaque année l'équivalent de 10% de la valeur des équipements pour pouvoir à leur remplacement. Soit à peu près 5 milliards de Fcfa. Rien de cela n'a été fait depuis le début. Conséquence : l'outil s'est complètement amorti. Il faut désormais partir de zéro ", tranche-t-il.
Pour remettre l'outil à neuf et l'adapter aux évolutions technologiques du moment, l'évaluation des investissements, commandée par le Dg, situe à 58 milliards Fcfa, le financement nécessaire, selon nos sources. Un tel investissement donnerait à la Crtv la possibilité de passer au numérique et de diffuser sur plusieurs chaînes thématiques en même temps. En 2005, seuls 500 millions de Fcfa ont été investis dans l'outil de production. Ce qui montre toute l'ampleur du travail qui attend le comité de réhabilitation de l'entreprise.
mboasawa
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