Mémorandum contre la révision
Batailles en perspective à l’Assemblée nationale Le “ Front du non ” à la révision de la Constitution cherche des alliés chez les députés pour barrer la voie au projet qui pourrait leur parvenir bientôt.
Le débat sur la révision ou non de la Constitution du Cameroun va de plus en plus dans tous les sens. Parce qu’il n’est ni orienté ni canalisé. Il est dans la rue, les gargotes, les chaumières, les salons feutrés, etc. Avec des échos différents et divergents. Et parce que ce débat n’est pas interactif, chaque camp campe sur ses positions en jouant la partition avec les moyens dont il dispose pour faire entendre sa voix, et au besoin tirer la couverture de son côté. Mais le rapport de forces tel qu’il est présenté est déséquilibré. Car le camp du “ Oui ” animé par le chef de l’Etat, Paul Biya, dispose de plus de marge de manœuvres pour s’imposer. Selon certaines indiscrétions, il entend déposer son projet de loi portant révision de la Constitution du 18 janvier 1996 à l’Assemblée nationale dont la prochaine session s’ouvre en mars.
Si le président de la Répu-blique décidait de prendre finalement cette voie malgré des cris dissonants et dissidents, tout porte à croire que son projet passerait comme lettre à la poste. Car le parti au pouvoir s’est octroyé 153 sièges à l’Assemblée nationale sur les 180 que compte l’institution, ne laissant que 27 maigres places à l’opposition ( ?). Mais cette géographie des sièges au palais de Verre de Ngoa Ekelle ne traduit guère l’aspiration des élus du peuple sur la question de la modification de la Constitution. Dirigeants, cadres, militants de base et élus du Rassemble-ment démocratique du peuple camerounais (Rdpc) sont divisés sur le sujet. La hiérarchie du parti des flammes en est consciente. Le secrétaire général du comité central du Rdpc, René Sadi, a battu récemment le rappel des troupes (tous les présidents de section) pour les mettre en garde à propos de la discipline du parti. Longtemps avant eux, ces sont les députés Rdpc qui avaient reçu des ultimata à ce sujet. L’Exécutif vient de leur promettre émoluments et avantages divers pour leur fermer les yeux. Le Rdpc a beaucoup plus peur de son ombre.
La contre-attaque
Face à cette situation, le camp du “ Non ” a aussi décidé de changer de fusil d’épaule. “ Le Front du Non ” qui regroupe des associations, organisations, partis politiques et société civile dans la ville de Douala et ses environs entend plaider la cause du “ Non ” auprès des députés de la nation, toutes obédiences confondues. Ce regroupement qui milite pour une “ unité d’action visant à amener le chef de l’Etat à renoncer à la modification de la Constitu-tion”, souhaite remettre à chaque élu du peuple leur “ Mémorandum”. L’un des objectifs de la démarche des animateurs du “ Front du Non ” est “ d’apporter courage et détermination aux élus du peuples à résister à la modification et au tripatouillage à géométrie variable des textes de la République en général et de la Loi fondamentale en particulier. ” Ils ont engagé pour cela une mission de sensibilisation des députés afin qu’ils soient des “ avocats du Non à la modification de la Constitu-tion à l’Assemblée nationale. ”
La première étape de cette mission du “ Front du Non ” a été inaugurée à Douala. De tous les députés contactés, il n’y a que Jean-Jacques Ekindi, coordonnateur du Mouvement progressiste (Mp), a déjà reçu la caravane du “ Non ”. C’était vendredi dernier, à son domicile à Douala. “ Le chasseur du Lion ” a promis de se battre à l’Assemblée nationale et partout pour que la Constitution ne soit pas modifiée, notamment en son article 6, alinéa 2. “ Vous enfoncez là une porte ouverte ”, leur a-t-il dit. Pour “ Le Front du Non ”, “ la modification de la Constitution et en particulier l’article 6 alinéa 2 est une œuvre politiquement immorale, visant à permettre au président de la République de se représenter une troisième fois aux élections en 2011 ”. “ Le Font du Non ” engage les 180 députés à se battre “ pour le triomphe des aspirations de notre peuple à l’alternance politique au sommet de l’Etat.”