Bolloré accusé d’asphyxier les acconiers nationaux

Port de Douala :
Le groupe français s’emploie à asseoir un monopole sur le chargement et le déchargement des bateaux.
Junior Binyam

La correspondance adressée au Premier ministre, chef du gouvernement, Ephraïm Inoni le 04 décembre dernier avec en objet "marginalisation et asphyxie des nationaux au sein du groupement professionnel des acconiers (Gpac)", à des relents alarmistes. En conclusion, on peut lire, "rendu à ce niveau, seule votre intervention peut redonner force au Droit", écrit Jean Paul Kamga Nenkam, directeur général de Marine Magistrale ou Groupe 2M, une Pme camerounaise qui s’est investie dans l’acconage au port de Douala depuis 1995. Un secteur lucratif dans lequel est réalisé selon des experts, 65% du chiffre d’affaires de l’activité portuaire à Douala, mais où, paradoxalement, en l’espace d’une décennie, nombre d’entreprises camerounaises ont fait faillite. Il s’agit de : Sebams, Cam-Cam et Asat. Assa flirte avec le dépôt de bilan.

Ce recours au Premier ministre du Dg de groupe 2M intervient après plusieurs démarches dont certaines auprès de la justice qui a qualifié les blocages dont cette entreprise est victime sur l’initiative du Groupement professionnel des acconiers du Cameroun (Gpac) de "voies de fait". "Le comité consultatif d’orientation du Pad a relevé et signifié à son auteur (Ndlr : le Gpac), le caractère illégal de ses blocages. Mais son entêtement persiste tout comme l’opacité dans la gestion du syndicat", peut-on lire. Même la correspondance du Dg du Port autonome de Douala corroborant les voies de fait relevées par la justice, n’a pas inversé la donne puisque le Groupe 2M a reçu vendredi dernier un nouvel avis de blocage du Gpac qui exige du Groupe 2M le paiement de son encours dans ses comptes sous peine d’une suspension d’activité. Une pression constante qui a amené Marine Magistrale à payer entre le 1er juin 2007 et la semaine dernière 372.550.772 FCfa, sans pour autant qu’elle ne soit plus redevable vis-à-vis du syndicat.

Bolloré
La raison de cette situation est ainsi libellée dans la correspondance au Premier ministre : "profitant de son monopole de facturation, le syndicat a entrepris de gonfler artificiellement, sans rapport avec la réalité de nos activités, le débit de notre compte à travers des facturations anticipées sur plusieurs mois, des facturations injustifiés et des doubles facturations. Les délais de paiement sont passés de 30 à 04 jours", soutient M. Kamga Nenkam dont l’entreprise, ainsi placée en zone de turbulence, revendique 300 employés dont 100 permanents et 200 temporaires.
Cet "acharnement" du Gpac, selon l’opérateur camerounais, remonte à 2005 quand son entreprise a réalisé les tonnages les plus élevés dans la sacherie pour la 1ère fois depuis des décennies au nez et à la barbe des multinationales opérant dans le même secteur. Ceci à la faveur du "système H2B2, breveté au niveau de l’Oapi", qui "a permis de diminuer de moitié voire de _ les escales des navires, d’accroître de manière considérable [les] parts de marchés" du groupe 2M. Ce dernier réussit désormais à décharger 2500 tonnes par jour où les entreprises du groupe Bolloré, exerçant dans le secteur depuis des décades, et qui sont Saga, Sdv, Socopao, dont l’unique Dg, Christophe Pujalte, est par ailleurs président du Gpac, plafonnent à 1800 tonnes par jour.
C’est cette surreprésentation du groupe Bolloré dans le Gpac (lire article ci-dessous) qui est mise à l’index par les opérateurs camerounais qui révèlent que "le syndicat [est] dominé fortement par une multinationale contrôlant plusieurs sociétés et ayant par conséquent plusieurs voix lors des votes en Assemblée et des intérêts croisés avec d’autres membres".

Un argumentaire que réfute intégralement le Gpac. Ceci à travers une lettre datée du 20 novembre dernier et adressée aux "membres du gouvernement en charge des dossiers socio-économiques et au directeur général du port autonome" avec en objet "paix sociale au port de Douala". La correspondance cosignée par tous les membres du bureau du Gpac, relate que "depuis quatre ans, l’activisme d’un membre du Gpac, la société Groupe 2M, passe outre ces dispositions et menace aujourd’hui de faire exploser l’association. Cet activisme se caractérise par : La contestation systématique des règles de fonctionnement ; le non-paiement conséquent des notes de charges au point où sa dette vis-à-vis de l’Association constatée à 60 millions en 2003 a culminé à 198 millions en mai 2007 ; l’obtention auprès de la justice d’ordonnances de contrainte visant à forcer l’Association à lui octroyer des facilités portuaires, alors même qu’elle n’est pas en règle de ses charges comme tous ses confrères nationaux et multinationaux".
Les autres points soulevés ont également trait à la condamnation de l’attitude du Groupe 2M qui a recours à la justice pour jouir de son bon droit et "l’utilisation maligne d’arguments nationalistes". Mais la correspondance du Gpac reste muette sur ses comptes et les soupçons d’opacité qui pèsent sur sa gestion et qui ont amené le Tribunal de grande instance du Wouri à prendre une ordonnance exigeant un audit des comptes de ce syndicat qui brasse des sommes faramineuses.

mboasawa

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