Paul Biya ne parlera pas à Jeune Afrique

Revirement :

François Soudan, qui avoue s'être rendu au palais, dément avoir interviewé le chef de l'Etat.
Alain B. Batongue

Comme les nombreux lecteurs du magazine panafricain ont dû le constater, Jeune Afrique n'a pas publié, dans son édition de lundi dernier, une interview (fort attendue) du chef de l'Etat Paul Biya. Cette interview risque d'ailleurs de ne jamais être publiée. François Soudan, le directeur de la Rédaction, qui ne nie pas l'essentiel des informations contenues dans notre article publié lundi le 12 mai dernier, affirme cependant qu'il n'y a jamais eu d'interview avec le président de la République.
Dans son blog, François Soudan fait cet aveu pathétique : " J'ai fait, la semaine dernière, un rapide voyage à Yaoundé, très exactement du 8 au 10 mai (…) J'y ai vu des amis, deux ou trois de mes contacts et je suis allé, à deux reprises, au Palais d'Etoudi où se trouvait le président Biya. De là est née la folle rumeur. Dès le 12 mai, plusieurs journaux évoquent une probable grande interview de Biya à JA. Le 13, le quotidien Mutations, au demeurant sérieux et informé, titre: "Visibilité : Paul Biya parle à Jeune Afrique ". On y donne le jour de l'entretien (vendredi 9 mai dans l'après-midi), son contenu (l'opération anticorruption Epervier, l'arrestation prochaine de personnalités, la révision de la Constitution, etc…), ainsi que la date de parution : lundi 19 mai, veille de la fête nationale !

Tout cela est inexact, puisque je n'ai pas réalisé d'interview avec Paul Biya, mais la rumeur enfle sur la toile. On m'appelle de Yaoundé, de Paris et d'ailleurs. A Maputo, où se tiennent les AG de la Banque africaine de développement, notre envoyé spécial Samir Gharbi est abordé par des délégués camerounais, qui lui demandent avec insistance le texte de l'entretien ! "
Comme on s'en sera rendu compte, le patron de la rédaction de Jeune Afrique avoue s'être personnellement rendu à deux reprises à la présidence de la République pendant que le maître des lieux s'y trouvait. Habile ritournelle pour ne pas reconnaître qu'il l'y a rencontré, ce qui n'est pas dans ses habitudes, lui qui généralement au cours de ses passages à Yaoundé, est " briefé " par les proches collaborateurs du chef de l'Etat.
Le fait que les rencontres entre le président de la République, friand de mystères, et François Soudan aient été ébruitées par la presse n'a-t-il pas amené la présidence de la République à revoir sa stratégie de communication ? A moins que la qualité et la profondeur des déclarations faites par Paul Biya n'aient amener ses services à demander un report de la publication de l'échange, qu'il ait été traité ou non en interview ?

Un autre élément de compréhension à prendre en compte est le fait que François Soudan soit arrivée à Yaoundé dans les bagages de Patricia Balme, habituée du palais d'Etoudi ces temps derniers où elle s'occupe, sur la base d'un contrat, de la communication et de la visibilité à l'international du chef de l'Etat camerounais. Les contours de l'affaire n'ont-ils pas été totalement goupillés jusqu'ici ? A titre de rappel, Patricia Balme est à l'origine de l'interview accordée par Paul Biya à France 24 au cours du mois d'octobre dernier en marge de son premier tête à tête avec Nicolas Sarkozy.
La principale leçon de cet imbroglio est tirée par François Soudan lui-même : " l'opinion camerounaise, au sens le plus large du terme, est à ce point sevrée d'information et de communication présidentielles qu'elle prend ses désirs pour des réalités. De quoi donner à réfléchir à l'hôte du Palais. " Autrement dit, si le président de la République communiquait plus avec ses concitoyens et expliquait ses actions, il y aurait probablement moins de polémiques de cette nature.

mboasawa

3713 Blog des postes

commentaires