Depuis avant hier, policiers et gendarmes détruisent les comptoires des petits commerçants.Du marché central à l'avenue Kennedy en passant pars Sho, on se serait cru revenu au temps des émeutes de février 2008, au regard de l'impressionnant déploiement des forces de l'ordre présentes à ces sites hier jeudi 5 mars à Yaoundé. Policiers et gendarmes, dont le Groupement polyvalent d'intervention de la gendarmerie (Gpig) spécialisé dans la lutte contre la grande criminalité et des policiers anti-émeute, étaient visibles devant le carrefour Parc Repiquet, de même qu'aux différentes entrées menant au marché central. Postés devant le magasin Bricolux et armes au poing pour certains, ces derniers empêchaient les automobilistes d'emprunter la voie à sens unique aboutissant à l'Avenue Kennedy.
Non loin d'eux, sous le regard d'une foule de curieux, les vendeurs assistaient à la démolition de leurs étals par un engin de la Communauté urbaine de Yaoundé (Cuy) dont les agents, présents sur les lieux, étaient facilement reconnaissables à leur tablier bleu estampillé "Cuy". Tout le long de cette brettelle routière, des planches amoncelées, recouvrant des marchandises que certains vendeurs n'ont pas eu le temps de déménager à temps, donnent l'impression d'un champ de bataille. Impuissants, les commerçants de l'Avenue Kennedy spécialisés la plupart dans la vente de téléphones mobiles et d'appareils électroniques, voient leurs produits confisqués par la police. Un véhicule anti-émeute à jet d'eau, suscitant une débandade à sa vue, n'a pas manqué de faire déguerpir quelques récalcitrants à coups d'eau.
Souverain pontife
Impossible de prendre la moindre image, au risque de se voir confisquer son appareil photo ou sa caméra. "Nous n'interdisons pas que vous filmer, mais il faut avoir une autorisation du préfet (du Mfoundi) ou du délégué du gouvernement", déclare un gendarme. "Nous n'avons pas été avertis. Ils sont arrivés ce matin et ont commencé à tout casser", relate un vendeur de sous-vêtements, en récupérant les planches de son défunt comptoir. Même son de cloche chez les autres. Si les comptoirs du marché central et de l'Avenue Kennedy ont été totalement rasés, de même que ceux des vendeurs installés sur les trottoirs, ceux du marché Sho, installés au bord de la route, ont été contraints à fermer boutique. Jusqu'à nouvel ordre. Mais quand ? "Un gendarme a dit qu'on ne pourra ouvrir que le 22 mars", avance une vendeuse de draps.
Si ces déguerpissements successifs rentrent dans le cadre de l'embellissement de la ville de Yaoundé et ont aussi pour but, surtout au niveau de l'Avenue Kennedy et du lieu dit "Immeuble de la mort" à la Poste centrale, de "nettoyer cette zone (Avenue Kennedy et lieu dit immeuble de la mort, Ndlr) hautement criminogène de la capitale", certaines indiscrétions à la police lient cette action d'éclat publique à la venue du souverain pontife le 17 mars prochain. Bien que cette opération d'assainissement de la voie publique soit fortement saluée, eu égard à l'occupation anarchique de la chaussée et du trottoir, on déplore néanmoins qu'il faille attendre la venue de Benoît XVI d'une pour rétablir l'ordre. Dans ce souci qu'à le Cameroun, de vouloir à tout prix montrer une "image propre" à l'Occident. "On dit que le pape vient nous apporter la bénédiction, c'est plutôt la ruine qu'il apporte avant même son arrivée précède", a glissé un vendeur de vêtements de sport à son ami. Mais sitôt après le départ des forces de l'ordre, les vendeurs avaient à nouveau exposés leurs marchandises.
Patricia Ngo Ngouem
mboasawa
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