Affaire Crédit foncier :
L'ex-Pca qui avait dénoncé et boycotté son procès revient au moment où les " hommes de paille " sont jugés.
Jean Baptiste Ketchateng
Il n'était pas la vedette de ce procès comme lors des dernières séances. André Booto à Ngon était sagement assis hier devant ses juges au tribunal de grande instance du Mfoundi à Yaoundé. L'ancien président du conseil d'administration du Crédit foncier du Cameroun avait pourtant expliqué le 18 décembre dernier qu'il ne se présenterait plus devant le tribunal qui le juge pour le détournement de deniers publics dans la banque dont il fut un dirigeant. "J'irai attendre ma condamnation chez moi à Bafia", avait lancé le septuagénaire, aux bords des larmes, devant une " justice manipulée".
M. Booto à Ngon, qui n'était pas présent aux deux dernières audiences, a demandé et obtenu du tribunal le droit d'aller se reposer alors que le procès se poursuivait. Il n'a donc pas pu écouter le principal animateur du prétoire ce lundi. Koh Koh, fonctionnaire en détachement à l'Institut supérieur de management public, était en fait l'accusé qui devait démontrer hier qu'il n'a pas aidé Joseph Edou, l'ex-DG du Crédit foncier, à détourner les quelque 3,5 milliards de Fcfa perdus dans le projet immobilier d'Olembe II qui devait permettre de réaliser 1034 logements sociaux dans cette banlieue de Yaoundé.
Selon l'accusation, c'est à travers la "société écran" The Falls, dont M. Koh Koh, "homme de paille", était le gérant, qu'une bonne partie de cet argent aurait été volée. L'accusé prétend par contre qu'il a bien servi comme employé à l'occasion à The Falls, mais qu'il n'a rien fait d'illégal. Puisque son engagement avait été pris sur la base d'une discussion qu'il a eue avec Serge Assoolo, le fils de Joseph Edou. Il avait rencontré M. Assoolo dans une assemblée chrétienne, qui lui avait parlé des projets que des investisseurs français voulaient réaliser au Cameroun. Plus tard le fils Edou l'avait présenté à son géniteur.
De fil en aiguille, Joseph Edou demande à Koh Koh de se présenter chez un notaire qui lui fait lire les statuts de la société The Falls avant de le mettre en contact avec Gabriel Ateba Minkoulou, le " fondateur " de l'entreprise. Le même jour, M. Ateba cède à M. Koh des pouvoirs élargis pour agir au nom de The Falls. Et entre 2003 et 2006, ce dernier brassera des millions de Fcfa sur la base de la lecture des statuts et des explications données par Joseph Edou et Serge Assoolo. "J'ai travaillé en toute confiance", dira l'accusé.
Saint Thomas
Pourtant, il aurait dû se méfier, comme Saint Thomas, "puisqu'il a dit qu'il est chrétien", lui a expliqué le procureur. The Falls, rappellera le ministère public, a été créée le 21 juillet 2003 par un " planteur " nommé Ateba Minkoulou avec un capital de 25 millions de Fcfa. M. Ateba qui est le beau-frère de Joseph Edou cèdera ses pouvoirs à M. Koh Koh qui avoue ne pas" connaître [ce personnage] qu'il a vu quelques fois chez M. Edou, trois jours plus tard. C'est la même entreprise qui ira constituer avec Roger Tchoufa, et d'autres personnes, la société Atlantic Group, dont elle détiendra la majorité des actions: 45%.
Le directeur général d'Atlantic Group, Roger Tchoufa, peut alors venir demander auprès du Crédit foncier un prêt pour financer le projet immobilier géant d'Olembe II, dans des conditions jugées irrégulières par l'accusation. Pour le procureur, cela suffit à prouver que " Koh Koh savait ce qui se passait et qu'il a eu sa part ". Car comment a-t-il pu acquérir cinq hectares de terrain à Odza, banlieue huppée de Yaoundé et 4 autres à Minkan sur la route de l'aéroport, 30 hectares à Mbalmayo, une villa de 109 millions à Bastos-Yaoundé, pour une société qui ne " produisait rien ", selon ses propres termes, sans jamais rendre compte à son " patron " Ateba Minkoulou ? Ne doutait-il pas au regard de l'absence d'activités de l'origine des fonds ? "C'est justement ce que le Seigneur a reproché à Thomas : de douter", a répondu Koh Koh.
mboasawa
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