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Gino Sitson : La voix c’est l’instrument le plus pur

Le jazziste Camerounais parle de ses débuts et de son troisième album " Bamisphère ".
Propos recueillis par Marion Obam






Comment arrivez vous à la musique qui vous a éloigné physiquement du Cameroun pendant sept ans?
J'ai envie de dire que j'y suis tombé dedans comme Obelix, ma mère étant chanteuse d'église. On peut même remonter plus loin parce que mes ancêtres étaient des " Ntontah ". C'est-à-dire des joueurs d'instruments à vent. D'ailleurs, la voix n'est-elle pas un instrument à vent elle aussi ? Le plus pur, le plus léger, puisque l'instrument est notre corps. Sans doute que ces voix ancestrales m'ont ouvert le chemin de la musique. Cet environnement musical a joué sur moi inconsciemment. Mais de ces influences, on ne s'en rend compte que plus tard. Lorsque j'ai commencé à jouer de la batterie et chanter, c'était juste un besoin profond et urgent, dont je ne cherchais pas à identifier les sources. Mes parents ne m'ont pas véritablement encouragé dans cette voie. Au début, je l'ai même cultivé en cachette car ça n'était pas très bien vu d'être musicien, ni dans ma famille, ni par les autres d'ailleurs.

Que défend votre musique ?
J’ai trois albums sur le marché actuellement qui aborde pratiquement les mêmes thèmes et militent pour les mêmes combats. Mon premier album "Vocal Deliria" faisait la satyre de la corruption, avec le titre Makalapati, qui est une véritable gangrène dans notre société. Le second " Song Zin'...Vocadelic Tales ", qui a été classé parmi les 10 meilleurs disques de jazz pour l'année 2002 par le Los Angeles Times, avec en prime une nomination aux Koras Awards et finaliste prix Découvertes Rfi 2000, évoquait les discriminations raciales, tribales et sexuelles. Le dernier " Bamisphere " parle de mes racines ouvertes et nomades.

Vous venez de sortir votre troisième album " Bamisphère ", qui est fidèle au premier dans le style Jazz. Pourquoi le Jazz?
A vrai dire, j'ai commencé à écrire ma musique sans me rendre compte qu'elle avait une connotation " jazz ". C'est plus tard que je m'en suis rendu compte, lorsque les gens autour de moi ont commencé à apposer ce qualificatif à ma musique. Mais le jazz n'est-il pas d'inspiration essentiellement africaine. De toutes les manières, j'ai horreur de étiquettes, d'être enfermé dans un carcan. Je ne saurais qualifier ma musique; c'est tout simplement un condense de mes "différentes vies" (camerounaise, française et américaine). Pour finir, je dirais aussi que ma musique ne correspond pas véritablement à un style préexistant. C'est un jazz novateur, un concept revisité par le Cameroun, ses rythmes, ses mélodies, ses joies, ses danses, ses cris, ses pleurs. Ses vibrations en somme!

Est-ce la transmission émotionnelle recherchée qui vous a guidé dans le choix de vos collaborations musicales ?
Un peu oui. C’est vrai que Bamisphère qui est album qui a dix titres très ouvert dans les styles jazz, vocalise et instruments est très coloré. J’ai travaillé avec deux africains-americains, notamment Ron Carter et Jeff Tain Watts, un brésilien Helio Alves et un nigérian Essiet Okon Essiet. Vivre dans un autre continent, précisément aux Etats-Unis, et exister en tant qu’artiste, garder son identité dans cette multitude de cultures, ce n’est pas évident. J’y arrive en travaillant avec acharnement. Je dois aussi avouer qu’avoir des racines profondément ancrées dans la culture de l’ouest Cameroun m’aide énormément. Cette culture est la base de mon travail, de ma musique qui se veut généreuse, ouverte au monde, à la vie.

mboasawa

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