
Mais avant cela, le public camerounais avait été déçu en 2005 de ne pas avoir vu Matt Damon en concert, ainsi que le duo en Maréchal Papillon et Meiway en 2006 et même que le premier concert de Diam's en 2007 avait déjà avorté. Pour essayer de comprendre ces échecs réguliers des concerts au Cameroun, il faut pénétrer dans la cuisine de l'organisation de ces évènements
" Le spectacle ne se boucle pas le jour où la communication commence ", explique Chinois Yangeu, directeur de Cy Entertainment, une structure qui s'est spécialisée dans l'organisation d'évènements liés à la musique. D'après Chinois Yangeu, " il y a des règles à respecter pour réussir un spectacle. Il faut d'abord connaître la disponibilité de l'artiste par rapport à la date du concert, il y'a les modalités techniques du raider de l'artiste, de ses musiciens et manager, puis intervient le cachet qu'il faut régler à hauteur de 50%. On termine la préparation par la réservation du lieu et on ne peut déclencher la communication sur l'évènement que quand on a bouclé son budget à 50% ". Le règlement de ces éléments qui interviennent des mois avant la date du spectacle participe du succès ou du flop du show annoncé. "L'organisation d'évènements culturels est une science qui doit être pratiquée par les professionnels. Rédiger un projet demande une expérience et la connaissance du terrain et des normes en matière de spectacles. Au Cameroun, beaucoup d'amateurs se lancent dans la promotion de concerts parce qu'ils ont des affinités avec des directeurs marketing dans les entreprises qui vont débloquer des millions. Mais si on n'a pas l'expertise et une équipe compétente, on fonce droit dans le mur", précise Gérard Betoka de Border Blaster.
Amateurisme
Un avis partagé par l'artiste Nicole Mara. " Le monde du show business est rempli d'amateurs. Si l'artiste n'honore pas à un rendez pris avec un public précis, il faut s'interroger. Il faut être sûr que l'organisateur a traité avec le bon manager, pas le frère, ni l'ami, encore moins le garde du corps. Beaucoup de personne pensent qu'être en relation avec un proche de l'artiste suffit à l'avoir mais il y'a une démarche professionnelle qui doit être respectée". C'est ainsi que l'on arrive à des situations où le concert est annulé alors que parfois "l'intéressé n'est pas informé qu'il ou elle doit prester ce jour là", confie Lady Ponce avant de poursuivre " Un samedi soir vers minuit je reçois un coup de fil d'un responsable de boîte de nuit à Douala qui m'agresse parce que je suis attendue depuis 20h et je ne suis pas là alors que j'ai déjà perçu 150.000Fcfa. J'ai failli m'évanouir. Je n'étais au courant de rien."
C'est ainsi que prolifère des prestidigitateurs de spectacles dans les villes de Douala et Yaoundé et parfois en province. Il y'a des fois dans la même ville l'artistes est annoncé à quatre endroits différents pour prester. " Je reconnais que je donne mon accord de principe à tous ceux qui veulent m'avoir sur un plateau. Le protocole d'accord n'engage pas l'artiste. Je signe le contrat avec le premier qui me verse de l'argent", confie Njohreur. Grâce Decca a d'ailleurs porté plainte en décembre 2006 à un de ces organisateurs qui avait osé mettre son image dans un spectacle d'ouverture d'une boîte de nuit sans son accord et des démentis avaient été diffusés à Spectrum Télévision. " Il faut reconnaître que beaucoup d'artistes manquent de moyens et de temps pour engager des poursuites contre ces destructeurs d'images. Moi je confie systématiquement mes contrats à mon avocat en cas de pépin j'engage des poursuites ", précise Nicole Mara.
Image
Ces multiples échecs des concerts prévus et des rendez-vous manqué avec le public rongent petit à petit l'image de l'artiste. Lady Ponce se plaint du fait que " le public ne va retenir que le plaquage dont il a été victime et cela va causer un tort à l'évolution de la carrière ". Pour Mathématik qui venait d'annuler des concerts argumente sur le fait que " la promo était mal faite. Le plus important pour moi en spectacle c'est de communier avec le public. Quel intérêt j'ai de jouer pour 20 personnes dans une salle qui peut en contenir 200 ? J'ai envie de satisfaire le public qui a attendue mais j'ai aussi mon image à préserver et on peut la bousiller avec ce genre d'opérations foireuse."
C'est vrai que beaucoup de promoteurs pêchent par leur inexpérience des rouages du milieu, mais il faut aussi cependant relever que les artistes sont très capricieux. " Nous n'avons pas la capacité d'accueillir des artistes d'un certain rang au Cameroun du point de vue logistique, hôtels, salle de spectacles, scène et sonorisation. On peut encore forcer avec le Hilton pour dire que c'est un cinq étoiles, mais si l'artiste exige un cinq étoiles de luxe, je ne sais pas où on va le trouver au Cameroun ", rappelle Gérard Bétoka avant d'insister sur le fait " qu' il faut bien éplucher le raider, le nombre de serviettes, les bouteilles d'eau, la marque car un concert peut être annulé parce que le cachet n'a pas été payé à temps, mais aussi parce que dans les loges la barre de chocolat blanc de kinder demandée a été remplacée par un Mambo". Des détails que les non professionnels ont tendance à oublier et l'addition est souvent très salée.