Roger Moudio fredonne ses déboires

De par les textes et les orchestrations, le premier album de l’artiste force l’admiration.
Eugène Dipanda





Le thème n’est certainement pas nouveau. Avant Roger Moudio, de nombreux autres artistes musiciens ont en effet abordé le sujet de la déception amoureuse dans leurs chansons. Mais, l’auteur compositeur de "Moukengue" met une certaine manière à dire les choses. A travers le choix des mots et des symboles notamment, qui donnent une teinte toute particulière à l’œuvre. La chanson intitulée "Nini", qui passe en boucle depuis quelques temps dans certaines chaînes de télévision locales, constitue la parfaite illustration de cette touche singulière de Roger Moudio. Ici, l’artiste se remémore le souvenir de cette femme belle et attentionnée qui fut la sienne, à qui il a tout appris et tout donné, mais qui, insatiable, a malheureusement choisi d’aller voir ailleurs.

"Je lui ai montré la vie à Paris. Je lui ai appris à monter dans le métro. Elle était ma meilleure amie, je la considérais comme ma sœur, et pourtant elle ne cherchait que la petite bête pour s’évanouir dans la nature…", déplore l’artiste. De bout en bout de cette chanson, Roger Moudio semble ainsi mettre à l’index la boulimie et la méchanceté de certains être qui, pour des raisons souvent nébuleuses, développent un esprit de maraudage, qui semble d’ailleurs de plus en plus se cultiver de père en fils. Et comme pour s’en défaire, Roger Moudio invite ses fans à danser le makossa qu’il leur sert, "à la façon des fourmis rouges", qui semblent représenter tout un symbole pour l’auteur-compositeur.

Homosexualité
Le rythme choisi est super dansant. Sans doute l’influence d’un certain Manulo, que l’on retrouve avec un certain plaisir aux guitares et aux arrangements de cet album ; aux côtés du nommé Ekima Kolor, qui y laisse également éclore son talent d’instrumentiste. Sur la pochette de son disque, Roger Moudio prévient d’ailleurs les mélomanes sur ses intentions réelles. "Faire perpétuer le makossa traditionnel, pur et limpide…", lit-on.
L’option est donc claire. L’artiste se veut conservateur. Et il le prouve à suffire dans le titre "Mambo", qui rappelle aisément, dans le style et le feeling, les chansons à succès de la vieille génération des précurseurs du makossa. Un temps, les textes de Roger Moudio évoquent les voies insondables du Seigneur, à travers cet incontournable destin réservé à chaque être humain, qui, quoi qu’il en soit, ne peut le changer.

Les relations hommes – femmes, avec leurs interminables incompréhensions, leurs constantes infidélités et leurs perpétuelles déchirements, préoccupent par ailleurs l’artiste dans "Bito na bomi". Sans oublier le très langoureux "Songo la nyongo", ou le sensuel "Minya ma boso", une chanson mijotée à la sauce antillaise.
Dans la chanson "Homo", l’étonnement de l’artiste est cependant grand. Lui qui découvre que, dans la société camerounaise d’aujourd’hui, il est des hommes qui aiment désormais des hommes ; et les femmes, d’autres femmes. Une dénonciation qui tranche net avec la position d’un certain Petit-Pays sur le sujet. Sur fond de rythme essewe au début, cette chanson qui fera sans doute papoter dans les gargottes et bars-dancings, se mue progressivement en makossa typique. Décidément, la marque de fabrique que, d’entrée de jeu, Roger Moudio semble vouloir absolument coller à sa peau.

Album : Moukengue
Sortie officielle : Avril 2008
Auteur-compositeur : Roger Moudio
Nombre de titres : 11
Rythmes : Makossa, Zouk, Salsa…
Production : R.M.P.
A écouter : Nini

mboasawa

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