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Insubmersible

Lorsque Ruben Um Nyobe fondait avec ses compagnons le 10 avril 1948 l'Union des populations du Cameroun (Upc) dans un bar de New-Bell, " Chez Sierra ", l'ancien instituteur, commis des Finances et greffier était âgé de 35 ans.
Jean Baptiste Ketchateng

















Un an avant, il prenait part au congrès constitutif du Racam, un parti aux ambitions similaires à l'Upc et qui fut presqu'immédiatement interdit par la France coloniale. Il était trentenaire. L'âge où un homme peut être considéré comme mûr chez nous aujourd'hui. Pourtant, à l'époque, celui que le colonisateur français considérait déjà comme un adversaire à surveiller - les rapports de police disaient de lui qu'il cherchait à acquérir un savoir pour lui-même et pour l'émancipation des Camerounais - avait déjà tracé derrière lui les sillons sur lesquels des milliers et peut-être des millions de compatriotes maltraités par le règne de la colonisation allaient marcher.
Um avait 35 ans donc mais déjà, il avait embrassé un destin national et même africain, puisqu'il fut élu vice-président du Rassemblement démocratique africain (Rda). Dans la nuit noire de la colonisation, le " jeune " Um Nyobe avait aussi une passion pour l’instruction au point de pousser ses études jusqu'au baccalauréat, une performance inédite alors, l'école primaire supérieure étant placée au-dessus des jeunes camerounais comme un plafond de verre au-delà duquel brillaient les lumières des savoirs auxquels ils auraient voulu accéder.

Ainsi frappée d'ostracisme la jeunesse d'alors a participé avec Um Nyobe au combat pour la libération du Cameroun. Félix Moumié et Ernest Ouandié étaient âgés de 28 et 29 ans lorsque sous le regard bienveillant de "Mpodol " il prenait des responsabilités au sommet de la direction de l'Upc à Eseka en 1952. Deux ans plus tard, en 1954, les leaders upécistes fondent la Jeunesse démocratique du Cameroun, la Jdc, une organisation spécialement destinée à mobiliser la jeunesse camerounaise en vue de libérer le Cameroun de la colonisation.

A une époque où l'homme Noir dominé trouvait parmi ses semblables des voix pour dire qu'il n'était pas possible de vivre sans le colon blanc et la technique qui lui avait permis de transformer radicalement le visage de tout le pays, et mieux encore, de le faire partir pour gérer entre Camerounais et dans l'intérêt de tous, n'était-il pas courageux, pour des jeunes gens comme Um, Moumié, Ouandié et les milliers d’anonymes, de vouloir l'indépendance ?

Aussi, Mutations a-t-il pensé que 60 ans après la création de l'Upc et 50 ans après l'assassinat de Ruben Um Nyobe par la France et le gouvernement d'Ahmadou Ahidjo, la jeunesse pouvait dire ce qu'elle pense de celui qui, pour beaucoup, finalement, est une icône. Malgré l'effacement organisé de la mémoire collective de la vie héroïque de l'homme qui voulait un Cameroun libre et où il fait bon vivre.

mboasawa

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