Critique du pouvoir

Dans l’ivresse de son pouvoir, Paul Biya est un «dieu». Il paralyse indéfiniment la capitale (Yaoundé) entière pour un instant de passage, ignorant de ce fait même que la liberté de circulation des personnes et des biens est un droit inaliénable et qu’il n’est accordé qu’une priorité de passage aux cortèges d’urgence à vue.


Le monarque d’Etoudi se permet tous les écarts : le pouvoir de ne pas être coupable, responsable ou complice. Il fait et défait selon ses caprices. Il jouit du privilège du non respect des règles établies.

Avide de volume et non de rendement, il invite son gouvernement de 2009 au complot. «Aucun acte susceptible de nuire à la solidarité gouvernementale ne sera toléré», énonce-t-il. Traduction, il faut taire les crimes pouvant nuire à son image. Biya signe aussi des décrets pour soigner la façade, en oubliant par moments que certains de ces actes qui sanctionnent touchent ses propres amis ou ses plus proches collaborateurs.
En exemple, le décret n° 96/230 du 1er octobre 1996, qui frappe des personnes en situation d’exploitation illégale du patrimoine de l’Etat. Texte qui ne sera jamais appliqué. Jusqu’à nos jours et pour aussi longtemps que durera le régime Biya, une poignée d’individus connus continue de mettre en location de centaines de logements appartenant à l’Etat en encaisse tranquillement et illégalement 6,4 milliards de francs Cfa tous les ans.

Les associations montées au créneau pour dénoncer cet état de chose, vont en être dissuadées par des canons. Et le frais souvenir de février 2008 où les jeunes, pris au piège du désespoir, pensaient que leur président serait sensible à leur traumatisme. Ils passeront à l’holocauste avec, en prime, le revers éclectique télévisé d’un Biya visiblement irrité d’avoir été sevré d’une besogne particulière. Nos gamins, sortis du péril inhabituel pour le péril ordinaire, se contenteront d’un dépoussiérage de deux ou trois tarifs de denrées essentielles, en guise de compassion miracle. Les pauvres diables, acteurs crédules du champ du pouvoir, en ignoraient l’enjeu fondamental : en politique, le sentimentalisme est la stupidité qui tue. Seuls comptent les rapports de force. Doué de cet atout, Popol en fait un usage machiavélique.

Après le lion, le président camerounais a son totem favori : l’épervier. Le rapace emblème de la Maison blanche inspire l’ordonnateur de la politique camerounaise. L’Opération Epervier censée assainir les mœurs règle visiblement des comptes. D’une aile à l’autre de l’oiseau carnivore, gravitent des douleurs. La bête voltige dans le ciel, rendant imprécis son centre de gravité, pour ainsi hypothéquer la balance du droit. C’est à la tête du prévenu que se précise le crime ou l’innocence, la condamnation ou l’impunité de fait ; tout dépend de l’humeur du commanditaire ou du dernier rapport de commérages. La cabale est une sorte d’opéra de barbares animée par des rites ésotériques. Le probable devient mystique. L’improbable devient réel. C’est ainsi qu’il faut désormais percevoir le droit…
L’Antécode Biya, PP. 24 & 25


mboasawa

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