CRTV: Le personnel dénonce la gestion du Dg

CRTV:

Le personnel dénonce la gestion du Dg

Un collectif de personnels de la Cameroon radio and television (Crtv) vient de commettre une lettre ouverte à leur directeur général, Amadou Vamoulké. Elle est l’émanation de toutes les éminences grises de l’ensemble des directions de cet office. Jusqu’à hier, une cinquantaine de personnels l’avait déjà signée. Le document a été remis hier en fin d’après-midi à son destinataire par Charles Pythagore Ndongo, directeur de l’Information télé. Une réunion est prévue ce matin à la Tour de Mballa II entre le Dg et les journalistes de la rédaction centrale télé. De façon générale, tous les journalistes interrogés par Le Messager partagent l’esprit et la lettre de ce document que nous publions dans son intégralité.

Monsieur le Directeur Général,

Issac Mbella Essengue, journaliste à la Crtv, vient de mourir. Sa disparition, violente et surtout inattendue, nous a plongés, nous, ses camarades, amis et collègues, dans l’émoi. Elle nous laisse sans voix parce que Monsieur Mbella Essengue s’en est allé du fait de la quasi-indifférence de la structure dans laquelle il a travaillé pendant plus de 20 ans ! Elle nous laisse sans voix parce que vous avez à nos yeux failli, vis-à-vis de lui, à votre devoir de confraternité !
Mais, bien que nous soyons si choqués au plus profond de nous-mêmes, nous n’en sommes nullement surpris ! Car au fil des jours, votre management démontre le peu de cas qui est fait de la situation sociale des employés et plus encore des femmes et hommes qui, par-delà leur corps de métier, ont, avec professionnalisme, patience et engagement, œuvré au rayonnement de la Crtv que vous avez aujourd’hui la lourde charge et l’immense chance de diriger.
Les cas sont nombreux, depuis votre avènement, qui confortent chacun de nous dans ces constats. Pour ne s’en tenir qu’aux plus récents, nous citons :
- Ignace Ngonga Kapsi, journaliste, mort dans l’indifférence du fait de refus de la Crtv de lui verser des droits (arriérés de salaires) qui lui auraient ouvert la porte à une opération chirurgicale salvatrice ;
- Lambert Bobiong-No, monteur, mort dans l’indifférence parce que sans véritable moyens pour accéder à des soins de qualité ;
Essiane Ntolo et Mvogo Ekani, techniciens, morts dans l’indifférence totale de l’entreprise pour des raisons quasi-identiques ;
- Ayissi Olinga, technicien, mort dans l’indifférence malgré des démarches menées auprès des services compétents pour bénéficier d’une aide somme toute légitime de l’entreprise ;
- Monjowa Kamara, journaliste, morte de frustration. Car, écartée sans raison et malgré son talent et son professionnalisme de la présentation du journal télévisé, elle avait décidé face à l’urgence, de subir, sans aucune assistance de la Crtv, une opération chirurgicale dans une minable clinique. L’opération lui a été fatale.
- Eric Mballa Tang, Cadre administratif, mort dans l’indifférence, faute de moyens et d’assistance véritable de l’entreprise à la hauteur des services rendus.
A tous ceux-ci s’ajoutent d’autres cas aussi alarmants les uns que les autres, qu’il serrait fastidieux d’énumérer ici, mais dont la survenance, à une fréquence soutenue et inexplicable, a fait dire à certains observateurs que la Crtv est en passe de devenir un véritable mouroir (Triste record : 30 de nos collègues sont ainsi morts depuis le 1er janvier 2006 !).
Nous savons bien, et selon vos propres déclarations lors d’une réunion générale, que nous pouvons tous “ crever ” sans que vous ne sourcilliez.
Mais nous tenons à vous dire que vous êtes en train de mener la Crtv, cette maison qui nous est chère et dans laquelle vous semblez toujours si étranger pour beaucoup d’entre nous, vers une dérive fatale. Et cela du fait d’un management (‘moderne’ dans votre imaginaire) qui est coupé des réalités sociales de l’entreprise et du Cameroun.
En effet, de quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si un haut cadre doté d’un professionnalisme accompli de la trempe de Monsieur Isaac Mbella Essengue est incapable d’acquérir dans les délais raisonnables une simple paire de lunettes médicales ?
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si le même Mbella Essengue se trouve écarté sans explication aucune d’un dossier (cf. affaire Bakassi) qu’il suit depuis treize ans, au moment de son dénouement. Il s’agit pour nous d’une incongruité qui a eu un impact négatif sur son moral tant il est vrai que dans notre profession, la dispersion n’est plus de mise dans le suivi des dossiers. A chaque journaliste le sien. Mieux que tout autre journaliste parmi nous, M. Mbella Essengue avait la maîtrise de “ L’affaire Bakassi ” !
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si tous les avantages dont bénéficiaient les personnels sont unilatéralement bannis et sans explications ? cf.
- Gel de l’assistance sociale et de la liquidation des droits des retraités et défunts ;
- Non-reversement à la Cnps des cotisations sociales avec comme corollaire la suspension du paiement des allocations familiales (et partant la compromission du paiement des droits de retraites) ;
- Non-paiements des droits des personnels retraités décédés ou licenciés. D’où le refus des banques d’octroyer des crédits scolaires aux personnels de la Crtv ;
- Inadaptation de la couverture sociale ;
- Inadaptation du système de restauration ;
- Infirmerie non opérationnelle ;
- Suspension du paiement des frais de congés ;
- Arrêt des reclassements et avancements ;
- Non-paiement du 13e mois ;
- Effacement des “ régies ” ;
- Non-représentation du personnel au Conseil d’Administration ;
Etc.
De quel “ management moderne “ pouvez-vous vous prévaloir lorsque dans le même temps le Directeur Général et son Adjoint s’arrogent tous les privilèges et avantages comme les congés annuels payés à coûts de millions de Fcfa (16 millions pour l’un et 14 millions pour l’autre !)
De quel management “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir lorsque vous décidez de domiciliez le compte principal d’une entreprise comme la Crtv dans Une Coopérative d’Epargne et de Crédit (Crédit du Sahel) ?
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si la gestion de la ressource humaine de l’entreprise est faite sur la base des règlements de compte qui entraînent des départs inexpliqués (cf. Elisabeth Mongori, Gervais Mbarga,, Henriette Medoung, Juliette Alené, Jean Atangana, Bouba Ahmadou, Boniface Awana, etc.) ou simplement la mise à l’écart de certaines figures de proue de la Crtv à travers des affectations fantaisistes aux allures de sanctions (cf. Ful Peter, Jean Lambert Nang, Nyoh Moses , Linus Pascal Fouda, Emmanuel Ayile, Atangana Bene, Ngoa Bilounga, etc.) ?
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si les directeurs opérationnels, nommés sur la base de leur compétence et de leur “ feuille de route ” sont freinés dans leur élan par des ingérences incompréhensibles de la hiérarchie ? Comment expliquer que des personnels nouvellement recrutés se retrouvent directement propulsés, sans l’avis du Directeur compétent, à la présentation du Journal télévisé (domaine ultra sensible réservé à des journalistes dotés d’un minimum de talent et surtout d’expérience au sein d’une rédaction !)
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si l’outil technique ne permet pas aux employés de donner le meilleur d’eux-mêmes pour relever les défis qui interpellent l’entreprise face à la concurrence de plus en plus rude ?
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si l’environnement global de travail est déplorable et commence à constituer une réelle menace pour la santé des employés du fait du surchauffement des équipements, de leur trop grande vétusté et de la présence avérée de l’amiante ? (Faites un tour dans les Bancs de montage, la Matrix, les Studios de production, de continuité et du Journal, les centres de diffusion pour vivre en l’espace de quelques minutes, le calvaire quotidien et le niveau d’exposition aux radiations de ceux qui y travaillent).
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si tous les grands annonceurs de la Crtv foutent le camp pour les chaînes concurrentes du fait d’une politique commerciale inefficace et pleine d’amateurisme ?
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si tous les pouvoirs sont délégués à un adjoint dont on ne se souvient d’aucun fait d’armes dans quelques domaines que ce soit ?
De quel “ management moderne ” pouvez-vous vous prévaloir si la Maison de la radio ne dispose pas d’eau (pour factures impayées) et de toilettes viables depuis décembre 2005 ?
Nous vous faisons grâce de la situation dans les stations provinciales que vous n’avez jamais daigné honorer d’une visite et dont l’état de délabrement et de dénuement sont le parfait reflet de la Crtv d’aujourd’hui (Crtv Bamenda, Crtv Bertoua, Crtv Buea entre autres).
Il est évident, Monsieur le Directeur général, au vu de ces quelques instantanés parmi un millier d’autres aussi significatifs, que vous avez réussi, en l’espace de quelques mois, à créer un environnement atypique à la Crtv. Environnement et climat finalement préjudiciables au bon fonctionnement de l’entreprise.
La Crtv aujourd’hui a plus que jamais mal à sa peau. Il n’y a qu’à voir le désoeuvrement dans lequel évoluent les employés pour s’en convaincre. Petit à petit, le décor se plante pour que la Crtv s’engouffre dans une voie sans issue.

Il y a lieu pour vous d’agir.
Il y a lieu pour vous de vous ressaisir.

Car du haut de votre tour, vous ne percevez pas les bouillonnements de la “ marmite Crtv ” et le malaise social ambiant qui sont sur le point de pousser les employés à la … révolte. Dans leur grande majorité, ils n’en sont pas si éloignés !
A travers cette lettre, monsieur le directeur général, nous voulons simplement, nous qui en sommes les signataires, tirer la sonnette d’alarme en mettant en évidence ce qui apparaît comme des dérives managériales et en exprimant tout haut des sentiments partagés par la très grande majorité des employés de la Crtv. Ce fleuron du paysage audiovisuel camerounais se meurt à petit feu.
“ Fille aînée du Renouveau ”, la Crtv mérite mieux qu’un tel sort. Au vu de sa contribution au maintien de la paix sociale au Cameroun. L’expérience des années de braises reste encore vivace dans nos esprits. Des années pendant lesquelles les journalistes chevronnés, dont Monsieur Isaac Mbella Essengue, avaient depuis Douala et au péril de leur vie, contribué à l’apaisement des consciences et des cœurs.
Pour tout cela, notre chère Crtv mérite mieux !
En vous souhaitant bonne réception et bonne lecture de cette lettre, nous restons à votre disposition pour une éventuelle rencontre dans les délais qui vous conviennent.

Fait à Yaoundé, le 24 août 2006.

Ampliations
- Président du conseil d’Administration Crtv
- Ministre de la Communication
- Secrétaire général de la présidence de la République
- Ministre du travail et de la sécurité sociale
- Ministre de la fonction publique et de la reforme administrative
- Ministre de l’Economie et des Finances
- Ministre de la Défense
- Secrétaire d’Etat à la Défense chargé de la Gendarmerie
- Délégué général à la sûreté nationale
- Directeur général pour la recherche extérieure
- Direction de la surveillance du Territoire

Affichage
- Siège de la Crtv à Mballa II
- Maison de la Radio
- Stations provinciales et FM
- Centres de diffusion
* la titraille est de la rédaction
 

Le messager
Le 25-08-2006


mboasawa

3713 Blog posts

Comments