Cameroun : Pourquoi la presse n’est pas viable

A l’initiative de l’Irex, des journalistes ont égrené le chapelet des obstacles qui se dressent sur le chemin des entreprises.
Priscille G. Moadougou

"L’indice de viabilité des média" au Cameroun. C’est l’intitulé d’un questionnaire auquel une douzaine de journalistes ont été soumis le 10 décembre dernier dans les locaux du quotidien Le Messager, à Douala. Cette séance de travail avait, entre autre objectif, de faire dévoiler par les hommes de media, eux-mêmes, ce qu’ils considèrent comme obstacles à la viabilité des entreprises de presse au Cameroun. La rencontre était organisée par l’Iinternational Research & Exchanges Board (Irex) en partenariat avec Journaliste en danger, (Jed), organisation indépendante et non partisane de défense et de promotion de la liberté de la presse. En conclusion des travaux, s’il appert que les médias publics ne connaissent pas de grosses difficultés dans leur fonctionnement, ce n’est pas le cas des médias privés dont la suivie tient sur un fil.

Parmi les obstacles qui empêchent une meilleure éclosion de la presse indépendante, l’on a recensé l’amateurisme dans lequel beaucoup de structures évoluent. "Les entreprises de presse doivent être gérées comme des entreprises tout court. Elles doivent donc non seulement avoir des budgets, mais aussi se fixer des objectifs à atteindre comme toutes les autres structures ", souhaite Mactar Sylla, directeur général de Stv. En outre, "pour que ces structures jouissent d’une certaine crédibilité, elles doivent avoir des équipements de travail appropriés et un personnel bien formé", poursuit-il. Si les gestionnaires d’entreprise de presse ne tiennent pas compte de ces aspects, la précarité restera la règle dans ce secteur d’activité, indique la même source.

Par ailleurs, s’il est vrai que la publicité constitue l’un des gros chiffres d’affaires des entreprises de presse, toutefois, jusqu’ici, le marché n’est pas régulé, surtout en ce qui concerne les multinationales. "Il n’est pas normal qu’au Cameroun, ces entreprises déboursent le tiers ou le quart de ce qu’elles paient au Sénégal ou en Côte d’Ivoire en insertion publicitaire", dénonce Mactar Sylla. Pour s’arrimer à ces pays d’Afrique de l’Ouest, le Conseil national de la Communication et le Conseil national de la publicité doivent donc jouer un rôle important dans la revalorisation des tarifs de publicité actuellement pratiqués dans la presse camerounaise. Ce qui a d’ailleurs une incidence sur les revenus des journalistes qui sont pour la plupart des clochardisés. La signature imminente d’une convention collective a d’ailleurs été saluée par tous, même si sa mise en application n’est pas garantie.

En outre, l’Etat devrait contribuer à réduire les taxes sur le papier et à rendre la connexion Internet accessible pour tous. Principalement pour les hommes de médias. Car au Cameroun, les tarifs en vigueur sont parfois 10 fois plus élevés quand dans d’autres pays du continent. Il s’agit pourtant d’un outil de travail, qui permet des échanges en temps réel. En outre, l’absence d’une véritable agence de presse, capable de fournir des informations en temps réel sur le territoire national ne rend pas facile l’activité journalistique au Cameroun. Dans ce contexte, l’aide publique à la presse privée gagnerait à être révisée. Encore que celle-ci dépend du niveau d’indépendance que le gouvernement camerounais veut conférer aux médias du pays.

mboasawa

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